Covid-19 : Principales mesures du décret n° 2020-418 du 10 avril 2020 portant adaptation des règles de réunion et de délibération des assemblées et organes dirigeants des personnes morales et entités dépourvues de personnalité morale de droit privé en raison de l’épidémie de covid-19

Publiée au Journal Officiel du 26 mars 2020 (JO RF, n° 0074, texte 41), l’ordonnance n° 2020-321 du 25 mars 2020 a adapté les règles de réunion et de délibération des assemblées générales et organes dirigeants, de tous les groupements de droit privé, dotés ou non de la personnalité morale.

Les conditions de mise en œuvre de certaines dispositions appelaient des précisions. Le décret n° 2020-418 du 10 avril 2020 complète le dispositif législatif avec à la fois des mesures générales et des mesures spécifiques aux SARL et à certaines sociétés par actions.

Entrée en vigueur : portée rétroactive partielle (D. n° 2020-418 ; art. 13)

Ce décret est applicable aux assemblées et aux réunions des organes collégiaux d’administration, de surveillance et de direction tenues jusqu’au 31 juillet 2020.

Les articles 1er, 3 à 5, 7, 9 et 10 ont une portée rétroactive fixée, comme l’ordonnance n° 2020-318, au 12 mars 2020.

L’article 2 relatif à la délégation de compétence au représentant légal, pour arrêter les modalités de tenue de l’assemblée et l’article 6, relatif aux modalités d’exercice des droits des mandants et de leurs mandataires, sont applicables à compter de l’entrée en vigueur du décret, soit le 12 avril 2020 (v. supra).

L’article 8-I, 2° relatif au mode de désignation des scrutateurs est applicable aux assemblées dont la convocation intervient après l’entrée en vigueur du décret.

I. Dispositions communes aux personnes morales et entités dépourvues de personnalité morale de droit privé (D. n° 2020-418 ; Chapitre Ier)

Comme l’indique l’article 1er du décret, ces mesures concernent toutes les entités mentionnées à l’article 1er de l’ordonnance n°2020-321, notamment, les sociétés civiles et commerciales ainsi que les masses de porteurs de valeurs mobilières ou de titres financiers.

 

  • Formalisation de la délégation de l’organe compétent pour convoquer l’AG (D. n° 2020-418 ; art. 2)

 L’ordonnance n° 2020-321 autorise l’organe compétent pour convoquer l’assemblée à déléguer au représentant légal sa compétence pour décider des modalités de tenue de l’assemblée : « à huis clos », par conférence téléphonique ou audiovisuelle, ou par consultation écrite (O. n° 2020-321 ; art. 4, 5 et 6).

Le décret n° 2020-418 complète cette disposition en précisant que la délégation doit (i) être établie par écrit et préciser (ii) la durée pour laquelle elle est consentie ainsi que (iii) l’identité et la qualité du délégataire.

 

  • Faculté pour les actionnaires de recourir à la messagerie électronique pour transmettre leur formulaire de VPC ou leur mandat, à condition que l’organe compétent ou son délégataire le décide (D. n° 2020-418 ; art. 3)

 

1) Sur la décision de la société, possibilité pour les actionnaires d’adresser leurs instructions de vote par correspondance en recourant à la voie électronique (D. n° 2020-418 ; art. 3 al. 1er). Le décret prévoit que l’organe compétent pour convoquer l’assemblée (ou le représentant légal agissant sur délégation de cet organe) peut décider que les membres de l’assemblée peuvent adresser leurs instructions de vote, le cas échéant sous la forme prévue par les dispositions législatives ou réglementaires qui régissent l’assemblée, les statuts ou le contrat d’émission, par message électronique à l’adresse électronique indiquée à cet effet dans la convocation (D. n° 2020-418 ; art. 3 al. 1er).

Entités concernées en pratique

Toutes les entités dont les assemblées peuvent recourir au vote par correspondance sont concernées.

Pour rappel et sans qu’aucune clause statutaire ne puisse y déroger, le recours à un formulaire de VPC est prévu notamment dans :

    • les SA à conseil d’administration (ou à conseil de surveillance et directoire) (C. com. art. L 225-107-I),
    • les SCA (C. com. art. L 226-1 al. 2 et art. L 225-107-I, par renvoi),
    • les SE (Règl. (UE) 2157/2000, art. 53 ; C. com. art. L 229-8).

Le formulaire de VPC est également prévu pour les AG d’obligataires, toute clause statutaire contraire étant réputée non écrite (C. com. L 228-61 al. 3).

Sont en revanche exclues de ce dispositif les assemblées d’associés de SARL puisque le vote par correspondance n’est pas possible (la consultation écrite est un régime distinct qui ne relève pas de l’art. 3 du décret).

2) Sur la décision de la société, possibilité pour les actionnaires de se faire représenter et d’adresser leur mandat par voie électronique (D. n° 2020-418 ; art. 3 al. 2). L’article 3 du décret n° 2020-418 précise que lorsque les dispositions législatives ou réglementaires qui régissent l’assemblée, les statuts ou le contrat d’émission, permettent aux membres de l’assemblée de se faire représenter, l’organe compétent pour convoquer l’assemblée ou le représentant légal agissant sur délégation de cet organe peut décider que les membres de l’assemblée peuvent adresser leurs mandats par message électronique à l’adresse électronique indiquée à cet effet dans la convocation (D. n° 2020-418 ; art. 3 al. 2).

Entités concernées en pratique

Pour rappel, la possibilité de donner mandat à un tiers dans les AG d’associés ou d’actionnaires est prévue par le code de commerce pour les SA (art. L 225-106), la SE (par renvoi de l’article L 229-8), la SCA (par renvoi de l’article L 226-1) et la SARL (art. L 223-28) etc. Elle est également prévue par le code de commerce s’agissant des AG d’obligataires (art. L 228-61).

 

  • Formalisme du procès-verbal d’AG (D. n° 2020-418 ; art. 4)

L’article 4 du décret précise également le formalisme que le procès-verbal d’AG doit revêtir.

L’alinéa premier vise les trois options permises par l’ordonnance n° 2020-321 : la tenue de l’AG « à huis clos » (O. n° 2020-321 ; art. 4), le recours à la conférence téléphonique ou audiovisuelle (O. n° 2020-321 ; art. 5) et enfin la consultation écrite des associés (O. n° 2020-321 ; art. 6). Dans ces cas, le décret prévoit que le procès-verbal établi en application des dispositions législatives, réglementaires ou statutaires qui régissent l’assemblée, devra mentionner les modalités de tenue de l’assemblée.

Le second alinéa prévoit une mention spécifique pour l’AG tenue « à huis clos » prévue par l’article 4 de l’ordonnance n°2020-321. Dans cette hypothèse,, le procès-verbal devra indiquer en outre la nature de la mesure administrative limitant ou interdisant les rassemblements collectifs pour des motifs sanitaires, affectant le lieu indiqué pour la tenue de l’AG à la date de la convocation ou celle de la réunion.

 

II. Dispositions applicables aux SARL et à certaines sociétés par actions (D. n° 2020-418 ; Chapitre II)

 

  • Possibilité de recourir au vote électronique en l’absence de clause statutaire ou figurant au contrat d’émission (D. n° 2020-418 ; art. 5)

L’article 5 confère la possibilité, à toute société, de recourir au vote électronique sans qu’aucune clause des statuts ne soit nécessaire à cet effet (D. n° 2020-318 ; art. 5 al. 1er). Cette faculté est également étendue aux assemblées d’obligataires, de porteurs de titres participatifs et de porteurs de VMDAC (D. n°2020-318 ; art. 5 al. 2)

Il conviendra d’appliquer l’article R 223-20-1 (pour les SARL), l’article R 225-61 (pour les sociétés par actions) ou l’article R 228-68 (pour les AG d’obligataires, de porteurs de titres participatifs et de VMDAC) ce qui emporte, notamment, le recours à un site de vote dédié.

 

  • Droit d’exercice des mandats et délai imparti pour faire parvenir les instructions aux mandataires et les instructions des mandataires dans les AG de SA tenues « à huis clos » (D. n° 2020-318 ; art. 6)

Lorsque les AG de SA se tiennent « à huis clos », le décret vient préciser les conditions dans lesquelles les actionnaires peuvent exercer leur droit à désigner un mandataire à l’AG. La présence physique de celui-ci était en application des textes jusqu’alors en vigueur en principe requise à l’AG pour communiquer les instructions de l’actionnaire.

Ce droit de l’actionnaire de donner mandat à tiers est préservé mais encadré dans des conditions de délai plus restrictives pour en permettre le traitement en amont de l’assemblée.

L’article 6 précise :

  • d’une part, que les mandats avec indication de mandataire, y compris, par dérogation à la première phrase de l’article R 225-80 du code de commerce, et ceux donnés par voie électronique dans les conditions définies à l’article R 225-61 du même code, peuvent valablement parvenir à la société jusqu’au quatrième jour précédant la date de l’assemblée générale ;

En principe, conformément à l’article R 225-80, les instructions données par la voie électronique dans les conditions définies à l’article R. 225-61 comportant procuration ou pouvoir peuvent valablement parvenir à la société jusqu’à 15 heures, heure de Paris, la veille de la réunion de l’assemblée générale. Dès la réception par la société de ces instructions, celles-ci sont irrévocables.

  • d’autre part, que le mandataire adresse ses instructions pour l’exercice des mandats dont il dispose, à la société ou à l’intermédiaire habilité par elle, par message électronique à l’adresse électronique indiquée par la société ou l’intermédiaire, sous la forme du formulaire mentionné à l’article R. 225-76 de ce code, au plus tard le quatrième jour précédant la date de l’assemblée.

 

  • Changement de mode de participation à l’AG par les actionnaires, par dérogation au principe d’irrévocabilité des instructions transmises (D. n° 2020-418 ; art. 7)

En principe et sauf clause statutaire contraire, il était impossible pour un actionnaire de choisir par la suite un autre mode de participation s’il avait déjà exprimé son vote à distance, envoyé un pouvoir ou demandé sa carte d’admission ou une attestation de participation (art. R 225-85-III).

L’article 7 du décret offre la possibilité pour l’actionnaire de changer son mode de participation à l’assemblée (par dérogation à l’article R 225-85, III) sous réserve que son instruction en ce sens parvienne à la société dans les délais légaux : J-3 avant l’assemblée minuit, heure de Paris (sauf délai plus court prévu par les statuts), J-1 15h, heure de Paris, par voie électronique ; sauf dans les cas prévus à l’article 6 du décret (relatifs aux mandats), les informations devant parvenir à la société à J-4, minuit heure de Paris avant l’assemblée. Dans ce cas et par dérogation à la seconde phrase de l’article R 225-80 de ce code, les précédentes instructions reçues sont alors révoquées.

 

  • Composition du bureau de l’AG en cas de tenue « à huis clos » (D. n° 2020-418 ; art. 8)

L’article 8 du décret précise les règles applicables :

  • pour la présidence de l’AG

Si l’assemblée d’actionnaires ne peut être présidée par le président du conseil d’administration ou du conseil de surveillance ou, en son absence, par la personne prévue par les statuts, elle est présidée par la personne désignée à cet effet par le conseil d’administration ou le conseil de surveillance parmi ses membres ou, en cas d’indisponibilité, parmi les mandataires sociaux.

Cette disposition est applicable aux SA, SCA, SE, assemblées spéciales des porteurs de certificats d’investissement et aux assemblées de porteurs d’actions à dividende prioritaire sans droit de vote.

  • pour la désignation des scrutateurs

En outre, l’article 8-I, 2° dispose que l’organe compétent pour convoquer l’assemblée ou son délégataire désigne deux scrutateurs, qu’il s’efforce de choisir parmi les actionnaires. A défaut, les scrutateurs peuvent être choisis en dehors des actionnaires. Outre les entités précédemment mentionnées, cette disposition est étendue aux assemblées d’obligataires, aux assemblées de porteurs de titres participatifs et aux assemblées de porteurs de VMDAC.

Cette disposition est applicable aux assemblées dont la convocation intervient après l’entrée en vigueur du décret.

 

 

Enfin, il est à noter que l’article 11 prévoit que les dispositions de cet article 8 peuvent être complétées par décret.

 

 

 

Décret n° 2020-418 du 10 avril 2020 portant adaptation des règles de réunion et de délibération des assemblées et organes dirigeants des personnes morales et entités dépourvues de personnalité morale de droit privé en raison de l’épidémie de covid-19

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Covid-19 : Principales mesures de l’ordonnance n° 2020-321 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles de réunion et de délibération des assemblées et organes dirigeants des personnes morales et entités dépourvues de personnalité morale de droit privé en raison de l’épidémie de Covid-19

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