Publication de l’ordonnance n° 2019-1067 du 21 octobre 2019 modifiant les dispositions relatives aux offres au public de titres

Prise en application de la loi Pacte (art. 75-II), l’ordonnance n° 2019-1067 (JO RF, 22 octobre 2019, texte 15) modifie les dispositions relatives aux offres au public de titres.

Comme l’indique son rapport au Président, cette ordonnance poursuit un triple objectif :

  • Tirer les conséquences de la modification de la notion d’« offre au public de valeurs mobilières » depuis l’entrée en vigueur depuis le 21 juillet dernier du Règlement (UE)
    n° 2017/1129 (dit Prospectus 3),
  • Supprimer les dispositions de droit interne qui seraient en contradiction avec les mesures prévues dans ce règlement,
  • Moderniser la règlementation relative aux offres au public en modifiant des dispositions qui pouvaient paraitre inadaptées.

 

Le code civil, le code de commerce, le code monétaire et financier se trouvent en partie modifiés.

Principales modifications

On retiendra principalement :

  • l’abrogation de l’article 1841 du code civil qui interdisait aux sociétés n’y ayant pas été autorisées par la loi de procéder à une offre au public de titres financiers, d’émettre des titres négociables ou de procéder à une offre au public, au sens de l’article L. 411-1 du code monétaire et financier, de parts sociales, à peine de nullité des contrats conclus ou des titres ou parts sociales émis. Le principe trouve désormais son siège à l’article L 411-1 du code monétaire et financier et est étendu à toute personne ou entité (et non plus uniquement aux sociétés) (art. 1er),
  • l’insertion aux articles L 221-13, L 223-12 et L 228-39 du code de commerce de la mention suivant laquelle la conclusion de contrats et l’émission de titres en violation de l’article L 411-1 du code monétaire et financier est sanctionnée par la nullité (art. 2, 1°, 3° et 14°). Ce principe était autrefois édicté à l’article L 421-3 du code monétaire et financier.
  • la mise en conformité du droit français avec les dispositions du Règlement Prospectus 3 concernant le prospectus à publier en cas d’offre au public de valeurs mobilières ou en vue de l’admission de valeurs mobilières à la négociation sur un marché réglementé (art. 2 -autres dispositions que les 1°, 3° et 14° susvisés ; art. 3, 4, 6 à 9, 11 à 15 et 17 à 25).
  • la suppression des dispositions de droit français devenues inutiles depuis l’entrée en vigueur du règlement Prospectus 3 (art. 5 ; 10, 9° ; 15, 6°, 25, 2° et 3°).

 

Nouvelle définition de l’offre au public retenue à article L 411-1 du code monétaire et financier

L’article L 411-1 du code monétaire et financier se trouve modifié, la définition de l’offre au public étant désormais calquée sur celle contenue dans le Règlement Prospectus (art. 10). Il s’agit d’une « communication adressée sous quelque forme et par quelque moyen que ce soit à des personnes et présentant une information suffisante sur les conditions de l’offre et sur les titres à offrir, de manière à mettre un investisseur en mesure de décider d’acheter ou souscrire ces valeurs mobilières », étant observé que cette définition « s’applique également au placement de valeurs mobilières par des intermédiaires financiers » (Règlement (UE) 2017/1129 ; art. 2, d)).

Tout contrat conclu ou toute émission de titres en violation de l’article L 411-1 encourt la nullité. Par dérogation au droit commun, cette action en nullité se prescrit par trois ans à compter du jour où la nullité est encourue

Adaptation des dispositions du code monétaire et financier suite à la nouvelle définition retenue de l’offre au public

Pour éviter d’éventuels conflits de qualification entre le droit français et le droit européen, les offres visées à l’article L 411-2 du code monétaire et financier seront donc elles aussi qualifiées d’offre au public (art. 10, 1°) mais échapperont à l’interdiction générale posée à l’article L 411-1. Ces offres demeureront donc valides en vertu de la loi (art. 10, 2°).

Pour rappel, l’article L 411-2 du code monétaire et financier visait jusqu’alors les offres dites de « placement privé ». Etaient autrement dit visées :

  • les offres de montants réduits répondant à l’article 211-2 RG AMF,
  • les offres réservées de fait à des investisseurs avertis,
  • les offres auprès d’investisseurs qualifiés ou auprès de gestionnaires pour compte de tiers,
  • les offres adressées exclusivement à un cercle restreint d’investisseurs.

 

Par ailleurs, l’ancien article L 411-2-I du code monétaire et financier faisait échapper jusqu’alors certaines offres à la catégorie d’offres au public (montant total inférieur à 8M€ / montant total par investisseur supérieur à 100 000€ / valeur nominale de chacun des titres offerts supérieure à 100 00€). Pour mettre en conformité le droit français avec le règlement européen, cette disposition est remplacée par un nouvel article L 411-2-1 qui prévoit de donner compétence à l’AMF pour établir dans son Règlement général des seuils de catégories d’offres au public pouvant faire l’objet de conditions particulières.

Enfin, conséquemment à l’extension du principe d’interdiction d’émettre des titres financiers ou des parts sociales aux personnes ou aux entités, l’ordonnance n° 2019-1067 modifie l’article L 411-3 du code monétaire et financier qui permet à certains émetteurs (qui ne sont pas des sociétés) de continuer à procéder à des offres de titres financiers au public. Sont ici visés un certain nombre d’organismes publics, les parts ou actions d’organismes de placements collectifs et les titres offerts par des entités étrangères (art. 10, 4°).